22.3.09

L’influence des idées sur le jugement émis sur le Mésolithique et ses productions esthétiques

Florence Bouvry
L’influence des idées sur le jugement émis sur le Mésolithique et ses productions esthétiques

Dans l’époque effervescente de l’anthropologie naissante, l’Europe revendique, tout en discutant l’évolutionnisme de Darwin, le progrès technique comme modèle de vie à adopter. Quelle influence les idées évolutionniste, positiviste, ethnocentrique ont-elles eu sur le jugement émis sur le Mésolithique et ses productions esthétiques ?
Dès 1850 les recherches du monde savant se tournent vers le passé le plus ancien et les origines de l’homme. L’évolutionnisme est au cœur des réflexions. Se multiplient les interrogations sur l’unité de l’espèce humaine, sur les raisons des différences culturelles. Il faut savoir pourquoi, si toute l’humanité est soumise au même mouvement historique, certaines sociétés ont progressé tandis que d’autres paraissent figées dans une irrémédiable primitivité. C’est dans ce contexte que se développe l’idée de race, de différence (c’est à dire d’inégalité) biologiquement donnée, notion appelée à rendre compte de la stagnation culturelle des populations non occidentales. Les civilisations non européennes sont classées selon leur indice de technicité. Le perfectionnement technique est à l’origine du progrès moral, du développement des Beaux-arts et des Belles-lettres.
C’est sur cette toile de fond que la périodisation mésolithique a été mise au jour, au moment de la découverte d’hommes fossiles comparables aux hommes sub-actuels qui confirmaient par leurs différents âges, les différents stades techniques du Paléolithique.
D’une part, suivant la théorie du progrès, le Mésolithique représente une société en régression technique par rapport à l’âge d’or de la civilisation magdalénienne. Il est classé au bas de l’échelle évolutionniste.
D’autre part, sous l’influence des tenants de l’académisme qui prônent la théorie de l’art imitation, les valeurs esthétiques sont imprégnées des idées héritées de L. de Vinci : la peinture est le premier des arts. Au regard de ce dogme, les Mésolithiques qui se limitent à quelques objets décorés de traits sont inférieurs aux Magdaléniens tout comme les Africains qui se limitaient à la sculpture, étaient nécessairement inférieurs aux occidentaux.
Dans ce contexte et dont l’idée de l’art perdure encore en ce XXIe siècle, comment parler d’art à propos des objets mésolithiques qui sont gravés et ou peints de traits bâclés, informes -premier stade du dessin-, sans figuration naturaliste- réaliste ? Pouvait-on, peux-t-on imaginer les étudier comme œuvres d’art ?